Et au Québec...
L’alpinisme n’aurait pas pu se développer au Québec. Les plus hauts sommets ne dépassant guère 1000 mètres. Par contre, l’influence des grimpeurs de falaise
se fera sentir dès 1928 avec la « découverte » de la paroi du Condor à Val-David. Petite histoire d’une petite région d’escalade.
Avant les premières tentatives de M. Brett, quelques randonneurs visitent les grands sommets du nord-est des États-Unis (Mont Colden, Adirondacks en 1850). Il ne s’agit pas là d’alpinisme ni même d’escalade, mais tout de même d’attrait pour la montagne. C’est donc à l’hiver 1928 qu’il faut remonter pour découvrir John Brett. Cet ingénieur d’origine Suisse fut séduit et revint quatre ans plus tard ouvrir la première voie d’escalade au Québec (La Valse, Mont Césaire, 5.3). La qualité de la roche (granite) l’incite à revenir avec sa famille et des amis. Bien des gens à cette époque avaient émigré des pays européens où les activités de montagne se pratiquaient depuis longtemps déjà. Les premiers « conquérants » sont donc à majorité Suisses, Français, Irlandais, Anglais… (ex : Pete Covo, voie « La Chico », 1943, 5.3)
La première ascension en libre de l’aiguille du Condor (5.5) sera réalisée le 23 mai 1947 (Granville « Red » Austin). La voie « L’impériale » (5.9), ouverte en escalade artificielle en 1949 par Julien Labedan sera réalisée peu après par Fritz Weissner en libre. À cette époque, l’escalade pratiquée utilise massivement des « outils » afin de parvenir au sommet. Les pitons et les étriers de bois servent très souvent. Cette grande première à l’aiguille sera soulignée dans un article du Canadian Alpine Club écrit par Brett. Fritz Wiessner (un américain ayant tenté le K2) viendra voir les sites d’escalade de Val-David peu de temps après. Dans les mêmes années, les premières voies rocheuses sont ouvertes dans le nord-est des Etats-Unis (John Case dans les Adirondacks).
Vers les années 1950-60 les grimpeurs d’Europe commencent à considérer l’escalade de falaise comme une activité en soi et non plus comme un moyen de s’entraîner afin de grimper les passages rocheux qui limitent l’accès aux sommets convoités! Ainsi, certains se nommeront un temps «rochassier» ou encore «calcairiste». Pour John Brett, l’escalade de rochers s’apparente à ce que l’on nomme en Europe « varappe » (nom d’une paroi rocheuse près de Genève). Les gens disent donc qu’ils vont faire de la varappe!
Les premiers Canadiens français à pratiquer l’escalade le feront intuitivement. Ils n’ont pas les connaissances des européens et les clubs anglophones sont relativement hermétiques. Julien Labedan est probablement celui qui initia le mouvement parmi les francophones. Il est le fondateur du Club de Montagne Canadien (1949) et dans son sillon nous retrouverons les Bernard Poisson, Gérald Gagnon, Claude Lavallée, Francois-Xavier Garneau et certains grimpeurs étrangers installés pour quelques temps au Québec (entre autre John Turner). Ils grimperont de nombreuses voies d’escalade et feront entre autres les premières au Cap Éternité! Le matériel est embryonnaire et les premiers mousquetons ne seront en vente à Montréal qu’à la fin des années 50! La sécurité posait des problèmes et la solution était simple; pas le droit de tomber! En effet, la corde était passée directement autour de la taille (pas de baudrier), donc, lors de la chute, la personne se voyait littéralement broyée par la corde… si celle-ci ne cassait pas!
À la fin des années 40 les parois des Laurentides, de l’Estrie et même de Luskville, près d’Ottawa sont visitées. Dans la région de Québec, Jean Sylvain, Roger Nadeau et d’autres explorent les parois et surtout celle de St-Siméon (Les Palissades). Bernard Poisson (encore lui!) développera énormément l’utilisation du matériel. Talentueux, il fabriquera des coins de bois à fixer dans les fissures du rocher. Ces morceaux de bois lui permettront de faire le fameux « Toit de Ben » au Mont King. L’après-guerre permet l’accès à du matériel plus spécifique tel les baudriers et les cordes en nylon. La chute devient possible sans grande complication. Ce faisant, l’on peut désormais prendre des risques! Les anglais, avec leurs rochers humides, développent une aisance et une supériorité technique en adhérence. Ainsi les membres du CMC apprendront beaucoup de l’un de ceux là : John Turner. Celui-ci fera en libre des voies très délicates et d’un très haut niveau technique qui ne seront pas répétées avant bien des années (parmi les grandes classiques d’Amérique).
En 1968, la Fédération des clubs de montagne est fondée entre autre pour répondre aux besoins en formateurs. C’est aussi la fin de la première vague de grimpeurs. Les européens qui nous avaient propulsé sur le devant de la scène de l’escalade en Amérique ont quitté le pays et les grimpeurs américains rattrapent leur retard et même nous dépassent (ceux des Shawangunks, entre autre). Les années 70-80 verront passer une nouvelle génération de grimpeurs avec les Normand Lapierre, Marc Blais, Claude Bérubé, Léopold Nadeau, Normand Cadieux, les frères Laperrière et Louis Babin, entre autre. Le niveau s’améliore, de nouvelles voies sont ouvertes et surtout des explorations importantes sont entreprises (Mont Thorngatt, Gaspésie, Abitibi, Ile Ellesmère…). De grands bouleversements accompagnent ces grimpeurs. Les cotations des voies s’appuient maintenant sur le système des Yosemites, l’étique et les techniques de grimpe sont dorénavant très différentes du style alpiniste des « anciens ».
Dans les années 80, l’escalade se démocratise et devient accessible. Les écoles d’escalade se développent, des cours sont offerts sur une base plus régulière. Le matériel a fait ses preuves et la sécurité est présente. Les clubs de grimpeurs sont en perte de vitesse et la Fédération Québécoise de la Montagne et de l’Escalade prend le relais. Les parois offrent de nouveaux horizons avec l’avènement des pitons à expansion. L’escalade de glace se développe ici comme ailleurs mais la proximité et l’hiver nous procurent un terrain de jeu exceptionnel. En Europe, vers 1985, les premiers SAE sont construit pour offrir un site d’entraînement aux grimpeurs et en 1992, le CEPSUM construit la première structure artificielle d’escalade du Québec. L’escalade, ici comme ailleurs poursuit son évolution. La pratique sur SAE est maintenant une activité à part entière pour certains et les compétitions s’organisent ici aussi. Depuis 1990, un grand nombre de structures seront construites et les écoles les utilisent même dans le cadre de leur cours d’éducation physique ou en activité parascolaire.
se fera sentir dès 1928 avec la « découverte » de la paroi du Condor à Val-David. Petite histoire d’une petite région d’escalade.
Avant les premières tentatives de M. Brett, quelques randonneurs visitent les grands sommets du nord-est des États-Unis (Mont Colden, Adirondacks en 1850). Il ne s’agit pas là d’alpinisme ni même d’escalade, mais tout de même d’attrait pour la montagne. C’est donc à l’hiver 1928 qu’il faut remonter pour découvrir John Brett. Cet ingénieur d’origine Suisse fut séduit et revint quatre ans plus tard ouvrir la première voie d’escalade au Québec (La Valse, Mont Césaire, 5.3). La qualité de la roche (granite) l’incite à revenir avec sa famille et des amis. Bien des gens à cette époque avaient émigré des pays européens où les activités de montagne se pratiquaient depuis longtemps déjà. Les premiers « conquérants » sont donc à majorité Suisses, Français, Irlandais, Anglais… (ex : Pete Covo, voie « La Chico », 1943, 5.3)
La première ascension en libre de l’aiguille du Condor (5.5) sera réalisée le 23 mai 1947 (Granville « Red » Austin). La voie « L’impériale » (5.9), ouverte en escalade artificielle en 1949 par Julien Labedan sera réalisée peu après par Fritz Weissner en libre. À cette époque, l’escalade pratiquée utilise massivement des « outils » afin de parvenir au sommet. Les pitons et les étriers de bois servent très souvent. Cette grande première à l’aiguille sera soulignée dans un article du Canadian Alpine Club écrit par Brett. Fritz Wiessner (un américain ayant tenté le K2) viendra voir les sites d’escalade de Val-David peu de temps après. Dans les mêmes années, les premières voies rocheuses sont ouvertes dans le nord-est des Etats-Unis (John Case dans les Adirondacks).
Vers les années 1950-60 les grimpeurs d’Europe commencent à considérer l’escalade de falaise comme une activité en soi et non plus comme un moyen de s’entraîner afin de grimper les passages rocheux qui limitent l’accès aux sommets convoités! Ainsi, certains se nommeront un temps «rochassier» ou encore «calcairiste». Pour John Brett, l’escalade de rochers s’apparente à ce que l’on nomme en Europe « varappe » (nom d’une paroi rocheuse près de Genève). Les gens disent donc qu’ils vont faire de la varappe!
Les premiers Canadiens français à pratiquer l’escalade le feront intuitivement. Ils n’ont pas les connaissances des européens et les clubs anglophones sont relativement hermétiques. Julien Labedan est probablement celui qui initia le mouvement parmi les francophones. Il est le fondateur du Club de Montagne Canadien (1949) et dans son sillon nous retrouverons les Bernard Poisson, Gérald Gagnon, Claude Lavallée, Francois-Xavier Garneau et certains grimpeurs étrangers installés pour quelques temps au Québec (entre autre John Turner). Ils grimperont de nombreuses voies d’escalade et feront entre autres les premières au Cap Éternité! Le matériel est embryonnaire et les premiers mousquetons ne seront en vente à Montréal qu’à la fin des années 50! La sécurité posait des problèmes et la solution était simple; pas le droit de tomber! En effet, la corde était passée directement autour de la taille (pas de baudrier), donc, lors de la chute, la personne se voyait littéralement broyée par la corde… si celle-ci ne cassait pas!
À la fin des années 40 les parois des Laurentides, de l’Estrie et même de Luskville, près d’Ottawa sont visitées. Dans la région de Québec, Jean Sylvain, Roger Nadeau et d’autres explorent les parois et surtout celle de St-Siméon (Les Palissades). Bernard Poisson (encore lui!) développera énormément l’utilisation du matériel. Talentueux, il fabriquera des coins de bois à fixer dans les fissures du rocher. Ces morceaux de bois lui permettront de faire le fameux « Toit de Ben » au Mont King. L’après-guerre permet l’accès à du matériel plus spécifique tel les baudriers et les cordes en nylon. La chute devient possible sans grande complication. Ce faisant, l’on peut désormais prendre des risques! Les anglais, avec leurs rochers humides, développent une aisance et une supériorité technique en adhérence. Ainsi les membres du CMC apprendront beaucoup de l’un de ceux là : John Turner. Celui-ci fera en libre des voies très délicates et d’un très haut niveau technique qui ne seront pas répétées avant bien des années (parmi les grandes classiques d’Amérique).
En 1968, la Fédération des clubs de montagne est fondée entre autre pour répondre aux besoins en formateurs. C’est aussi la fin de la première vague de grimpeurs. Les européens qui nous avaient propulsé sur le devant de la scène de l’escalade en Amérique ont quitté le pays et les grimpeurs américains rattrapent leur retard et même nous dépassent (ceux des Shawangunks, entre autre). Les années 70-80 verront passer une nouvelle génération de grimpeurs avec les Normand Lapierre, Marc Blais, Claude Bérubé, Léopold Nadeau, Normand Cadieux, les frères Laperrière et Louis Babin, entre autre. Le niveau s’améliore, de nouvelles voies sont ouvertes et surtout des explorations importantes sont entreprises (Mont Thorngatt, Gaspésie, Abitibi, Ile Ellesmère…). De grands bouleversements accompagnent ces grimpeurs. Les cotations des voies s’appuient maintenant sur le système des Yosemites, l’étique et les techniques de grimpe sont dorénavant très différentes du style alpiniste des « anciens ».
Dans les années 80, l’escalade se démocratise et devient accessible. Les écoles d’escalade se développent, des cours sont offerts sur une base plus régulière. Le matériel a fait ses preuves et la sécurité est présente. Les clubs de grimpeurs sont en perte de vitesse et la Fédération Québécoise de la Montagne et de l’Escalade prend le relais. Les parois offrent de nouveaux horizons avec l’avènement des pitons à expansion. L’escalade de glace se développe ici comme ailleurs mais la proximité et l’hiver nous procurent un terrain de jeu exceptionnel. En Europe, vers 1985, les premiers SAE sont construit pour offrir un site d’entraînement aux grimpeurs et en 1992, le CEPSUM construit la première structure artificielle d’escalade du Québec. L’escalade, ici comme ailleurs poursuit son évolution. La pratique sur SAE est maintenant une activité à part entière pour certains et les compétitions s’organisent ici aussi. Depuis 1990, un grand nombre de structures seront construites et les écoles les utilisent même dans le cadre de leur cours d’éducation physique ou en activité parascolaire.